jeudi 29 décembre 2011

Légendes

De Martin Winckler, éditions P.O.L
"Je ne sais pas quand commence cette curieuse dépendance, je sais qu'elle commence à Pithiviers au moment où je n'écris pas seulement des histoires mais aussi beaucoup de lettres.
Je n'écris pas encore aux écrivains. Je m'adresse à eux dans mes cahiers, car j'ai le vague sentiment qu'ils ne me répondraient pas. Et puis, comme je lis surtout des écrivains américains, j'ignore complètement où je pourrais bien leur envoyer une lettre.
J'écris aux journaux que je lis. Repérant un jour une erreur dans un dessin de John Buscema, sur un Marvel Comic rapporté d'Angleterre, j'écris au magazine pour la signaler - tout en précisant mon admiration pour Buscema et son Silver Surfer. On me répond quelques semaines plus tard en m'envoyant ... deux magazines flambant neufs, illustrés par mon dessinateur favori. Quelques mois plus tard, j'écris à Pilote une lettre très critique à laquelle René Goscinny répondra très gentiment."
Quand Martin Winckler raconte Marc Zaffran ... ou comment naît et grandit un écrivain.

mardi 27 décembre 2011

Mue

La mue comme une voilette précieuse,
Le dedans devient le dehors,
La couleur éclate.
Quand oserai-je en faire autant ?

vendredi 23 décembre 2011

La gourmandise


Comme le décrivent si bien les mots de René de Oldabia,
c'est bon la confiture sur les doigts.
C'est bon, c'est sucré, et c'est interdit.
En même temps, c'est amer quand le reproche retentit.
Et j'ai horreur d'être prise, les doigts dans le pot ...



mercredi 14 décembre 2011

La basse cour




Il était une fois une charmante poulette qui voulait devenir cocotte étoile, comme sa maman poule. Poulette rêvait de faire des pointes sur ses ergots, de s’envoler sur la scène des Folies de la Bergère, en agitant son truc en plume. Maman Poule dansait toujours au Cocori Cool, elle invitait souvent sa couvée à venir l’admirer. Quant à papa Coq, c’était le plus fort de la basse cour, car c’était un coq sportif : tous les matins, tour du poulailler en petite foulée, puis séries de pompes aile droite aile gauche, en finissant bien sûr au lever du soleil par un magnifique « Cocorrico ».
Pour apprendre à se dandiner gracieusement, Poulette se rendit dans une école de danse à Volaille ville. Comme la vie était différente de la basse cour : ici, les poulaillers faisaient dix étages, les œufs voyageaient dans des boîtes sur des rails, et surtout, on ne picorait pas les graines à même le sol, non, on se rendait au Mac Graines pour y déguster les « big extra suprêmes des volailles ».
Hélas, Poulette était du genre gourmande, et elle prit rapidement un peu de gras aux cuisses : rien de grave, elle était toujours charmante, mais maman Poule était un peu inquiète: « Combien de « big extra suprêmes des volailles » prends-tu par jour ?». Mais elle se garda bien de lui faire la morale, et lui raconta son dernier spectacle. Poulette adorait jacasser avec sa mère des numéros qu’elles faisaient chacune sur la scène. Papa Coq dit à sa fille : « ma cocotte, un bon entraineur te fera perdre facilement le peu de gras que tu as pris : si te veux, je chercherai pour toi quelqu’un de bien à Volaille ville ». Poulette était ravie des conseils de ses parents, car ce n’était pas toujours facile de faire les bons choix.
Maman Poule avait raconté à Madame Bio poule les aventures de Poulette. Celle-ci s’écria : « Comment ? On laisse les poulettes manger des « big extra suprêmes des volailles », alors qu’elles n’ont pas encore pondu un œuf ? ». Madame Poule Bio venait d’un élevage industriel, s’en été échappée pour suivre un coq de Bruyère, et vivait maintenant dans la basse cour. Ses os étant de mauvaise qualité, elle se déplaçait avec des béquilles. Elle était très soucieuse de l’alimentation, ayant ingurgité pendant des semaines des farines immondes. Dès la fin de la conversation, elle prit le premier vol de corbeaux et direction Volaille ville. Madame Poule découvrit le lendemain dans le journal que Madame Poule Bio avait saccagé avec ses béquilles tous les Mac Graines, et qu’elle était maintenant détenue dans le poulailler de sureté. « Pauvre Madame Poule Bio, pensa Maman Poule, tout ça pour aider ma Poulette ! ».
Poulette, en apprenant la nouvelle, laissa son paquet de chips au maïs, et se rendit aussitôt au sinistre « 22 les poulets ». Là, elle expliqua qu’elle connaissait bien Madame Poule Bio, que celle-ci était peut-être un peu excessive, mais que dans le fond, ce n’était pas une mauvaise poule de Bresse. Poulette et Madame Poule Bio rentrèrent à la basse cour, ailes dans ailes. Maman Poule et papa Coq étaient très fiers de leur Poulette : cette petite avait vraiment un cœur d’or, et pourra se défendre bec et ongles si besoin. Une grande fête fut organisée pour son retour : on dégusta de délicieux vers de terre, et Poulette et Maman Poule firent un duo de volaille, au son du Coq, dont tout le monde se souvint très longtemps.

dimanche 11 décembre 2011

Dresde

en.wikipedia.org
"Comparée à Berlin-Ouest, Dresde était toujours un tas de ruines coupé de façades brûlées. Sur les vertes collines de décombres, des bouleaux avaient déjà commencé à pousser. Les boutiques faisaient apparaître plus de planches que de vitres. Mais c'est dans une ville différente qu'entrait Alfred Dorn. A mesure qu'augmentait la misère de la ville réelle, il fallait que s'impose avec plus de force la ville qu'il avait en lui. Au désert transparent du centre ville, il opposait des impressions d'autrefois. Sa mère traverse la foule de la Theaterplatz, c'est Alfred qui la voit le premier. Sa mère ne s'était pas démaquillée. Elle venait de figurer et de chanter dans la Citoyenne de Nuremberg sur la Festwiese, c'était la première fois qu'elle se produisait à l'opéra, et elle aurait tout donné pour ne jamais se démaquiller. Le père d'Alfred avait honte de sa femme. Alfred était fier, car les gens qui étaient autour d'eux voyaient que sa mère faisait partie de la troupe."
Martin Walser, "Dorn ou le musée de l'enfance".

dimanche 4 décembre 2011

La coupole pour Adrienne

Ne pouvant pas t'envoyer de commentaire avec photo, voici une image prise l'an dernier : c'était début Décembre, la foule était là, et les cadeaux tombaient du ciel.

mercredi 30 novembre 2011

Le salon de musique du musée de l'enfance

Cher Monsieur,
J'ai découvert votre musée par la lecture de l'oeuvre de Martin Walser. Je me propose de restituer quelques pièces qui m'ont fait forte impression. Vaste musée, puisqu'il évoque votre vie, Alfred Dorn, né en 1929 à Dresde, mort en 1987 à Wiesbaden.

"La musique était pour lui ce que l'air frais était à d'autres. Depuis les morceaux qu'il étudiait chez Grundeis à Leipzig, il n'avait rien appris de nouveau, mais c'étaient des morceaux en compagnie desquels il pensait pouvoir passer toute sa vie : la Suite en mi majeur de Bach, le Concerto pour piano en la majeur et le Rondo en la mineur de Mozart, la Pathétique de Beethoven, l'Etude en la dièse majeur de Chopin et les Intermezzi de Reger. Quand il jouait ces morceaux, il avait l'impression de vivre, plus qu'en faisant n'importe quoi d'autre. Les problèmes techniques l'amusaient. Les décisions qu'il fallait prendre en jouant étaient plus faciles à prendre que toutes les autres décisions."

lundi 28 novembre 2011

mardi 22 novembre 2011

Gâteau de blog

Magie de l'écrit et des blogs : en suivant les recommandations énoncées, un objet apparaît. Et comestible, et  ma foi très bon !
La recette est ici, mais j'ai remplacé les myrtilles par les mirabelles.

dimanche 20 novembre 2011

Dorn ou le musée de l'enfance

de Martin Walser, éditions Robert Laffont.
Ici, le lien vers un article de Jean-Michel Palmier.

"Il faut retarder l'arrivée de madame Dorn afin de donner quelques informations sur ce couple. On risquerait, à être trop tôt témoin de la manière dont se comportaient ensemble cette mère et ce fils, d'avoir tout de suite recours au vocabulaire de service, Alfred et sa mère seraient vite étiquetés, et tout serait clair. Il faut essayer de tenir à distance aussi longtemps que possible tout le vocabulaire à prétention scientifique. Il vaut mieux que tout ne soit pas clair. Ou même que rien ne soit clair. Ne serait-il pas aussi possible de comprendre ce qui n'est pas clair ?"

mercredi 16 novembre 2011

Marque



"D'origine germanique mark (« frontière », « limite ») d’où « marquis » (originellement : « comte de la marche ») issu de l'indo-européen commun *merǵ-(« frontière », « limite »).
Originellement lié à la frontière, il signifie aussi « signe pour marquer la frontière », « démarquage ». C'est ce sens qu'il a conservé en français.
Le terme est apparenté avec le néerlandais ou l'anglais mark, l'allemand Mark, le suédois mark et le latin margo (« marge ». Comparez avec « marche » ou « marcher »)."
http://fr.wiktionary.org/wiki/marque

Signe de la frontière entre l'existence et l'oubli : réellement vital ?

http://www.carte-france.info/photos/photo-une,pierre,tombale.html


vendredi 11 novembre 2011

Entretien avec Adrienne

Bonjour Adrienne, tout d'abord merci de m'accorder un peu de votre temps pour cet entretien.
Je suis votre blog depuis plusieurs mois, ces billets quotidiens me donnent l'impression de vous connaître un peu. Alors, dites-moi si je me trompe : vous êtes une femme, qui aime les lettres, la nature, les amis, la vie...
Ce blog est pour moi un mystère. S'installer tous les matins devant son écran, envoyer un message sur l'humeur du jour, il faut une bonne dose de ténacité ! Alors quel est le moteur ?
J'ai pensé à un pari entre copains (si je tiens, je gagne mon poids en chocolat noir 70 %). J'ai aussi imaginé une oeuvre caritative (l'argent récolté par le blog envoyé aux enfants congolais belges). Bien sûr, il y a le merveilleux du blog, qui ouvre vers tout le monde, et personne en particulier (quoique, certains lecteurs semblent être très proches). Enfin, l'addiction, contre laquelle vous me mettiez en garde lors de notre premier échange ...
Alors ?
En tout cas, merci à nouveau pour la recette aux mûres, l'escapade italienne, les chroniques proustiennes, l'aventure de la corneille.
A bientôt
Céline

samedi 29 octobre 2011

Seul dans le noir

De Paul Auster, éditions Actes Sud
Choisi sur les conseils de GAlm. Une longue nuit d'insomnie, avec les souvenirs, les cauchemars d'un homme dans le noir.
"... je donnerais gros pour qu'elle apprenne que les actes odieux que les humains commettent les uns envers les autres ne sont pas de simples aberrations - qu'ils sont un élément essentiel de ce que nous sommes. Elle souffrirait moins, ainsi. L'univers ne s'effondrerait pas chaque fois qu'une mésaventure lui arrive et elle ne s'endormirait pas en pleurs une nuit sur deux."
Pierre Soulages. artpointfrance.info 
" Il n'y a pas qu'une seule réalité, caporal. Il existe plusieurs réalités. Il n'y a pas qu'un seul monde. Il y en a plusieurs, et ils existent tous parallèlement les uns aux autres, mondes et anti-mondes, mondes et mondes fantômes, et chacun d'entre eux est rêvé ou imaginé ou écrit par un habitant d'un autre monde. Chaque monde est la création d'un esprit."

mardi 25 octobre 2011

Force de l'ordre

Une émission à la radio à propos de la situation de la police en France, un livre à lire, de Didier Fassin.
C'est La Fontaine qui me vient à l'esprit :
"Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir."

dimanche 23 octobre 2011

Petits suicides entre amis

Arto Paasilinna , éditions Denoël.
Pas si simple de se suicider : alors pourquoi ne pas s'associer ?
Arto Paasilinna redonne le goût de vivre à ses personnages en les réunissant autour d'un même objectif, le suicide. On se retrouve au restaurant, on arrose la rencontre et on prend la route tous ensemble.
"Les suicidaires passèrent trois jours à Röntteikkösalmi. Dans la journée, ils éclaircissaient les rangs de betteraves et se régalaient de purée de pommes de terre et de saucisses Stroganoff mitonnées par Kati Jääskeläinen. Le soir, ils faisaient cercle autour du feu de camp et bavardaient entre eux, à des fins thérapeutiques.
Ils appréciaient cette saine vie rustique et seraient bien restés plus longtemps à la ferme, mais Urho n'avait pas d'autres travaux de binage à leur proposer.
Saucisses Stroganoff
Au moment du départ, l'agriculteur, qui avait appris le but du voyage des suicidaires et s'était lié d'amitié avec eux, déclara avec regret : " J'irais ben aussi m'tuer dans l'Nord ... mais nous aut'paysans, on a ben trop à faire en été. J'ai point l'temps d'voyager. Mais pourquoi qu'vous prendriez pas la patronne ? La Kati, elle a qu'ça à faire .. ça m'dérangerait point, qu'elle fasse un peu d'tourisme."

lundi 17 octobre 2011

Bestiaire

Ce reptile observe notre intérieur depuis quelques semaines.
Parfois nonchalant sous la chaleur de la lampe, vif chasseur l'heure venue.
Dinosaure, Australie, silence : fascination du lointain, aboli d'un clin d'oeil quand je croise ton regard.

dimanche 9 octobre 2011

La sève de nos vies

Les journées devenaient assez moroses, et je trouvai mes lectures plutôt sombres, même si le noir amène aussi des sourires. Dans la pile de livres près de mon lit, restait celui-ci : "La sève de nos vies" de Gérard Bessière, éditions Diabase.
"Il était penché depuis longtemps. Dès mon enfance, il était vieux. Mais il me semblait immortel : il était pour moi le grand-père des arbres qui entourent la maison. Chaque fois que je revenais vers ces lieux de ma vie, sa seule vue m'apaisait. En Novembre, ses larges feuilles prenaient une couleur qui alliait le jaune et l'or : à l'entrée dans la nuit, on les voyait encore, comme si elles étaient phosphorescentes. Il s'est cassé discrètement. Il a laissé le vide. L'hiver fut plus froid. Un sentiment de solitude s'est glissé dans le jardin. Le vieux mûrier est mort. Adieu, mon compagnon de toutes mes enfances.
Murier, Vincent Van Gogh
Je regardais parfois le moignon pitoyable. Mais un matin d'avril, quelle surprise ! Des dizaines de rejets jaillissaient de tous côtés : des tiges, des feuilles, une explosion d'avenir, alors que je croyais l'arbre mort."

jeudi 29 septembre 2011

Lucien Jerphagnon

La route était étroite, serpentant entre les champs déjà labourés et les tournesols fanés. Le soleil se couchait : le ciel était sublime. J'écoutai la radio, l'émission était une entrevue avec Lucien Jerphagnon. Le cru et le su, croire aux les mythes, la foi, c'est l'espérance de l'amour. Je m'efforçai de retenir le nom de cet historien de la philosophie, de suivre sa réflexion. La nuit est tombée.
Merci d'avoir éclairé ma route.

mercredi 28 septembre 2011

Ceux qui n'en mènent pas large

De Jean-Pierre Martinet, éditions Le dilettante
Georges Maman, acteur raté, et Dagonard, assistant de cinéma, passent une longue soirée ensemble. Qui se noiera le premier ?
"Oui, un chic type, au fond, on pouvait dire ça. Plein de tact et de délicatesse. C'était rare, dans le métier. Et, avec ça, toujours prêt à régler l'addition le premier. Comme dans les bons vieux westerns, il dégainait presque toujours avant son adversaire, et les protestations, les petits cris effarouchés, ne servaient à rien. En général, tout finissait bien : il casquait. Un dingue du carnet de chèques. Un maniaque de la signature ruineuse. On avait parfois l'impression qu'il avait quelque chose à se faire pardonner. Peut-être sa connerie, peut-être autre chose de moins apparent, comment savoir ? En tout cas, chapeau ! Il payait pour qu'on le supporte. Ils n'étaient pas si nombreux, ceux qui avaient ce genre de scrupules."
Jean-Pierre Martinet fut assistant-réalisateur à l'ORTF, critique à Matulu, et kiosquier à Tours (Libourne, 1944-1993).

jeudi 22 septembre 2011

Le syndrôme d'Ulysse

de Santiago Gamboa, éditions Métailié
Le narrateur est un jeune écrivain colombien arrivant à Paris : nombreuses rencontres dans un Paris plein de surprises. Après avoir cité les cahiers de Cioran, "il faut tâcher de se faire comprendre, un point c'est tout ; demeurer, si possible, intelligible, c'est un but à la fois difficile et modeste", il écrit : "Personne n'est obligé de s'intéresser à un livre, aussi bon soit-il, et personne n'est obligé de comprendre ce qui ne l'intéresse pas, aussi édifiant et véritable soit-il, alors je me dis quoi écrire ?"
Entrevue avec l'auteur dans le matricule des anges

mardi 20 septembre 2011

Elsa

Quatre récits de l'occupation, éditions Aden.
Elsa Triolet raconte le pays sous l'occupation. Le passage de la ligne de démarcation, la prison, et puis cette femme qui part se reposer à la campagne :
"Le clair de lune s'insinue par les volets entrebâillés. Tous les barrages sont rompus, le monde roule sur Jeanne, non, elle porte le monde en elle, sa tête est une mappemonde, avec tous les continents, les mers, les volcans, les glaces, et les neiges et les déserts, et les hommes, mon Dieu, les hommes, tous les hommes ... Se crever les yeux, voilà ce qu'il faudrait faire ! Se crever les yeux et le coeur, pour ne plus voir, ne plus savoir, ne plus sentir ... mon Dieu, faites que je ne sente plus !"

jeudi 15 septembre 2011

Alouette

Dezsö Kosztolanyi, éditions Viviane Hamy
Classique de la littérature hongroise. Atmosphère poussiéreuse des années 1900. Alouette, trop laide pour trouver un mari, reste avec ses parents vieillissants.
"Ces gens-là sont tous comme inaccessibles. Comme si tous vivaient sur une île, loin du monde, loin des lois humaines. Si encore il y avait un chemin qui vous mène là-bas. Jusqu'à cette île, jusqu'à cette assurance, jusqu'à ce masque. Mais il n'y a pas de chemin. On ne peut pas faire de la vie une comédie, on ne peut pas la vivre en costumes. Il y a des gens pour lesquels il ne reste que la douleur, la douleur informe, implacable, qui n'est bonne à rien et ne sert à rien, à rien qu'à faire mal, mal à l'intérieur duquel ils s'enfoncent, tristesse qui n'est qu'à eux dans laquelle ils creusent toujours plus profond leurs galeries sans fin, mine obscure qui finit par s'effondrer sur eux, ils se retrouvent prisonniers là, et pas de secours."

dimanche 11 septembre 2011

Le mur noir

Le Normandie
de Carl-Henning Wijkmark, éditions Cénomane.
Retour en Suède après des années d'exil : le pays vit maintenant sous des masques grotesques, gangréné par la corruption. Retour au pays de l'enfance, à la recherche des origines. Retour au point de départ de l'existence, ultime course avec la maladie.
"Elle eut alors une réaction inattendue, un sentiment dont je n'avais pu apercevoir que de courtes étincelles. Une grande joie. Elle explosa presque, disant en bégayant que c'était merveilleux que je sois de retour, que cela lui ouvrait de nouveaux horizons dans la vie."

samedi 27 août 2011

Crumble

La recette sur ce site (pas trop de pub, parmi mes critères de choix ...). Crumble : l'effritement qui adoucit l'amertume, des fruits et de l'existence.

lundi 22 août 2011

Agonie

Il était très vieux, avançait de plus en plus lentement sur les graviers. Un jour, des mouches lui ont tourné autour, et ont pondu leurs oeufs. J'essayé de le nettoyer, mais il n'était pas coopérant. Le lendemain, il est resté étendu toute la journée, se déplaçant pour trouver de l'ombre. J'ai vu que les asticots avaient grossi. Le vétérinaire a fait au mieux. Mais moi, n'ai-je pas prolongé son agonie dans le fol espoir d'une guérison ?


On causait de mouches ! Vous savez pas ce que c'est que de mourir de soif, mon général. Mais j'ai étudié ça, c'est assez bichant. Votre langue va d’abord gonfler. La déglutition deviendra de plus en plus pénible. Puis viendront les troubles auditifs, les troubles visuels, ensuite. C'est l’évolution classique. Les spasmes viendront plus tard précédant de peu l’agonie. C'est à ce moment là que les mouches attaqueront.  (Michel AudiardUn taxi pour Tobrouk, 1961).

mercredi 17 août 2011

Le vin de la colère divine

De Kenneth Cook, éditions Autrement. Ecrit en 1968, ce roman est un manifeste contre la guerre.
"Je suis ici, a répondu Karl comme s'il déclamait la réplique finale d'une pièce de théâtre, car dans la société moderne, le front est le seul endroit concevable où l'on puisse délibérément éviter de tuer quelqu'un. Je suis un pacifiste militaire."

Autre livre de Kenneth Cook : "Cinq matins de trop". John Grant est instituteur dans l'ouest de l'Australie et rentre à Sydney pour les grandes vacances. L'alcool, à nouveau, l'ennui, le néant. Adapté au cinéma en 1971 (Outback).
"Les étoiles, les étoiles de l'ouest, si nombreuses, si brillantes, si proches, si propres, si claires, qui tranchaient le ciel de leur froideur impitoyable ; des étoiles pures, dépourvues de passion ; des étoiles aux commandes de la nuit et d'elles-mêmes ; sans exigence et sans pitié ; elles se surpassaient dans leur rôle et représentaient l'élément indispensable permettant à Dieu de prouver que la création de l'Ouest n'avait pas été qu'une simple et grossière erreur."

samedi 13 août 2011

Rustine

La fatigue vous écrase, vous épuise, vous êtes à bout, vous êtes crevé ...
Alors, pour colmater les fuites, la rustine est idéale : la musique de l'Arpeggiata, un fondant au chocolat, le massage des pieds. L'effet est de quelques minutes à plusieurs jours, selon l'importance de la fuite.

lundi 8 août 2011

Le son de ma voix

de Ron Butlin, Quidam Editeur.
Bu quasiment d'une traite, ce roman m'a happée et continue de m'habiter.
"Si seulement elle s'était frayé un chemin à coups de griffes en toi, avait atteint la souffrance profonde en toi, pour la toucher, pour l'accepter. seule cette douleur aurait pu confirmer ce que tu étais alors - pas ses mots et ses caresses, son amour sans action."

mardi 2 août 2011

Chambre noire

D'Eva-Marie Liffner, éditions Rivages/noir. Un roman noir pour les vacances, parfait. J'imaginais déjà ces heures où les yeux ne peuvent se détacher des lignes, avec délice. Hélas pour moi, pas de grand frisson à la lecture, alors que le livre a reçu le prix du meilleur roman policier suédois.

mercredi 6 juillet 2011

Les jours, les mois, les années

De Yan Lianke, Editions Philippe Picquier
"A ce moment-là, le bruit d'une averse prochaine se fit entendre. L'aïeul tapota la tête du chien et se dirigea sans bruit, à tâtons, vers l'arête de la montagne. Arrivé là-haut, il vit surgir par intervalles une dizaine, une vingtaine de rats à la traîne qui longeaient la route vers le sud en poussant de petits cris perçants. Il ne parvenait pas à y croire : sur ce chemin de terre dur comme fer, il y avait maintenant une couche de poussière épaisse comme un doigt, des rats pressés les uns contre les autres étaient passés par là, constellant le sol de traces de pattes."
Très beau conte.

dimanche 3 juillet 2011

Se perdre

Merci à GAlm de m'avoir amener vers Annie Ernaux.
"Quand verrai-je les choses en termes distanciés ? Mais alors je deviendrai incapable d'écrire ce que j'écris ici, incapable d'être attentive à ces mouvements humains, quasi impalpables, insoupçonnables auparavant, que provoquent la passion, le désir et la jalousie."

lundi 27 juin 2011

Je m'en vais

de Jean Echenoz, les éditions de Minuit.
Une vidéo de Jean Echenoz m'a conduite à lire un de ces romans. Texte semblant couler de source : "Ferrer fraternisa avec toute la famille Aputiarjuk. A table, il eut un peu de mal à comprendre la profession du père avant de comprendre que celui-ci n'en avait pas. bénéficiaire d'allocations, il préférait chasser le phoque au grand air plutôt que suer dans un petit bureau, dans une grande usine ou sur un gros bateau."

mercredi 22 juin 2011

Les maisons

Coq2Roche3.jpg
Coq de roche
"Nous sommes dans le noir, assis au fond de la salle. Il y a, près de nous, mais je ne le vois pas, un gros chien à poils longs. Je sais qu'il est là.
La boule de plumes vives (un coq exotique) est lancée vers nous. Relancée vers nous, puisque notre tâche consiste à la renvoyer afin que le chien n'en fasse pas son lot.
J'ai peur. La progression de la dévoration s'effectue en dépit de nos efforts. Le chien doit, à chaque fois, rogner un peu plus le coq, et nous ne parviendrons sûrement pas à le sauver."
Catherine Weinzaepflen, éditions Spectres familiers
Métaphore de notre existence ?

mercredi 15 juin 2011

L'Italie si j'y suis

Mocassins Stéphane Gontard - Stromboli
  de Philippe Fusaro, éditions La fosse aux ours.
Dès le début, ce type ne m'était pas sympathique. Quel frimeur ! Et puis, est-ce qu'on boit comme un trou quand on a un enfant avec soi ? Sans doute un roman autobiographique. Ca ne me donne pas envie de le rencontrer, ce bellâtre ...
J'ai lu assez vite le livre, j'étais finalement bien accrochée à l'histoire de ce pas du tout macho, et de son cosmonaute de fils.
Bref, j'ai succombé (une fois de plus) au charme italien.
Merci aussi pour la musique citée en fin d'ouvrage.

dimanche 12 juin 2011

La petite fille au fond du jardin

La petite fille au fond du jardin"Je l'avais nommée Anichoira, un diminutif d'Anne. Elle ne répondait peut-être pas à son nom, mais certainement à ma voix car quand je l'appelais, elle se soulevait et venait vers moi pour se frotter à mes jambes. Parfois, elle frottait sa barbiche contre mes pieds. Une amie fidèle.
Un jour, je rentre de l'école et Anichoira ne m'attend pas. Elle n'est pas là, je la cherche au fond du jardin, elle n'y est pas. Juste à ce moment, je vois mon père penché sur ma chèvre morte, bouche contre une entaille faite à l'un de ses pieds, il souffle, tout rouge, et la peau de l'animal se décolle lentement du corps. "Mon Anichoira !""
Bluma Finkelstein, éditions DIABASE
Un livre qui ne s'éloignera pas de ma table de chevet, et que j'offrirai volontiers.

vendredi 10 juin 2011

Janie (suite)


« Découverte macabre à Champagnol » : c’est affiché sur tous les bords de route, devant les marchands de journaux. Ce qui a été un choc terrible pour moi, c’est de retrouver Janie au cours de gym. Comment est-ce possible ?
Je l’ai tué hier, chez elle. Aucun doute, sur la sonnette figurait bien son nom « Dominique Najide ». Elle m’a ouvert, un peu surprise, mais m’a proposée un café. Je l’ai suivie dans la cuisine, et je l’ai poignardée quand elle s’est tournée vers les tasses. J’ai réussi à couper la tête, avec beaucoup de difficulté : je la garde d’ailleurs près de moi, dans un sac.
Je me suis sentie enfin soulagée. Je ne verrai plus jamais ce double sourire, cette double menace. Je ne craignais plus rien, Janie était morte.
Alors, tout à l’heure, quand je l’ai vue au cours de gym, j’ai cru m’évanouir. La soi-disant Claude était dans tous ses états : « Quel horrible crime. Comment peut-on être aussi cruel ? » Etait-ce son fantôme ? Cette femme possède-t-elle deux corps ?
Je tremble d’avoir percé son mystère : c’est un monstre, venu me persécuter.
Demain, j’irai chez Claude Caïnje, et je la tuerai.

Quand j’ai appris qu’on avait retrouvé le corps décapité d’une deuxième femme à Champagnol, j’ai été terrorisée. Un malade mental s’amuse à découper ses victimes dans la ville où je vis.  J’étais déjà très touchée par la mort de Dominique, on travaillait ensemble depuis une dizaine d’années. Je ne voyais pas qui pouvait s’en prendre à elle, c’était quelqu’un sans histoire. J’ai lu dans la presse le récit de son meurtre, puis celui de la deuxième victime. Je cherchai à comprendre, à trouver des points communs : les deux étaient célibataires, l’une était secrétaire, l’autre professeur de gymnastique. C’est alors que j’ai ressenti un haut le cœur : quelqu’un m’avait déjà demandé si ces deux femmes se ressemblaient. Mais qui ?

jeudi 9 juin 2011

L'avenir de la famille


"Sais-tu qu'il y a des papas sur lesquels on ne sait pas grand-chose ?"

"Par contre, ce que tu sais sûrement déjà, c'est que plus ta maman est loin, plus elle te manque."

Nikolaus Heidelbach
Editions il était deux fois

Moi non plus, je ne sais pas grand chose sur mon papa.
Moi aussi, ma maman me manque, surtout quand elle est assise à côté de moi.

mercredi 8 juin 2011

Impatiens


Fleur d'ombre, ton coeur fascine.
J'ai écarté tes pétales.
Trop vite.
Maintenant,
Espérer le prochain bouton.
Attendre.

dimanche 5 juin 2011

Janie

Janie prétend qu’elle s’appelle Claude. Elle est devant moi, elle donne un cours de gymnastique douce. « On respire, on se redresse, voilà ». Elle fait comme si je ne savais pas. De mon côté, je l’appelle Claude, comme tout le monde. En même temps, je vois bien qu’elle est encore contrariée. On s’est disputées une heure plus tôt, normal qu’elle s’en souvienne.
Sauf que tout à l’heure, elle se faisait appeler Dominique. On était toutes les deux au bureau, et comme souvent, on s’est fâchées.
Comment fait-elle pour vivre ses deux vies, sans se mélanger les pinceaux ?
Elle ne se trompe jamais. Un jour, pour voir, je l’ai appelée « Claude » dans le couloir : elle a continué son chemin.
Je sais qu’elle sait que je sais.  Je suis la seule à savoir qu’elle s’appelle en réalité Janie. Personne d’autre que moi ne la connais sous ce prénom. Parfois, j’ai peur. Cette double vie si parfaite cache quelque chose. Peut-être qu’un jour elle voudra éliminer un témoin gênant. Peut-être qu’il faudra que je prenne les devants.
Je ferai bien d’en parler. J’ai déjà essayé.  « N’importe quoi, elles ne se ressemblent pas du tout » m’a dit un jour Thérèse, que j’avais amenée au cours de gym. J’avoue qu’elle m’a fait douter.
Mais alors, comment expliquer le fait qu’elle garde de la rancœur contre moi le soir, quand on s’est accrochées dans la journée ? Et pourquoi un grand sourire au cours de gym les fois où on a bien rigolé  à la pause café ?
Je ne lui en ai jamais parlé. C’est tellement troublant pour moi. Dans un sens, je suis heureuse de partager son secret, notre secret.
Janie, moi seule te connais vraiment.

vendredi 3 juin 2011

Tante Emelina

Ma chère Emelina,
Non, ce n'est pas ça la vie.
La vie, c'est voir ces champignons.
C'est être Shirley Temple.
En tout cas, pour vous.
Sans doute est ce extravagant.
Comme toutes les vies.

jeudi 2 juin 2011

Les cinq femmes

"Quelques mois plus tard, l'horreur s'était drapée d'habitude, quand Olinda trompa l'implacable surveillance et réussit à la voir. Son visage émacié était strié de rides et sa bouche, édentée. Ses cheveux en bataille étaient d'un blanc jaunâtre. Ses yeux éteints regardaient dans le vide. Elle portait une robe de chambre usée jusqu'à la corde, noire de crasse. On aurait dit une misérable mendiante, une petite chose de rien du tout.
Lorsqu'elle la reconnut, elle lui tendit une main-grappin à travers les barreaux.
- Olinda !
S'ensuivit un long silence aride, abyssal. Puis elle dit d'une voix fatiguée, noyée dans le brouillard :
- Dis, ma fille, c'est ça la vie, non ? "
José Triana, éditions Actes Sud
Le décor se met en place, les personnages s'avancent, on entend leur ruminations mentales. Le brouillard persiste. Je comprends alors, et le drame éclate. Fin.

samedi 28 mai 2011

A Djinn,

Qui es-tu ? Toi tu le sais. Une femme. 
Qui suis-je ? Une femme. Ah bon ? Pourtant, hier, j'étais une petite fille.
Suis-je ?
Descartes a dit ... Très pratique. 
Parfois, autour, le monde est réel, autour du néant. Comme un organe creux.
CL

vendredi 27 mai 2011

Le Choeur des femmes

Martin Winckler, éditions POL. Pour commencer, l'envie d'en savoir plus sur ce livre. Ensuite, découvrir l'univers de Martin Winckler. Chercher des ressemblances avec des lieux connus. Puis me retrouver dans les histoires de ces femmes, puis me retrouver dans l'histoire de cette interne. C'est un livre étonnant, à la fois manifeste, policier, énigmatique, éducatif. A partager (en plus, il est assez épais).

mardi 24 mai 2011

Peigne anti-idées noires

Peigne

Avant toute chose, se laver la tête : musique douce, massage, la détente doit être maximale. Dans le cas contraire, pleurs et grincements de dents seront garantis. Puis passer le peigne, idée par idée. Les idées noires, plus épaisses, sont retenues par les dents du peigne. On peut alors les éliminer à l'aide d'un mouchoir : quel bonheur de les voir se tortiller dans le vide. Le peigne retient aussi les idées noires en germe, plus petites mais plus nombreuses. Il a donc un effet préventif incontestable. Une utilisation hebdomadaire assure un bien-être durable. 

samedi 21 mai 2011

Rosacée

La rose n'est pas éphémère. 
Elle largue ses pétales et poursuit son chemin. 

mercredi 18 mai 2011

Le vivomètre

C'est un objet à porter sur soi, autour du cou, ou à la taille. L'essentiel est qu'il suive les mouvements. Un sourire reçu ou offert, un élan vers l'autre ou vers soi : le vivomètre s'active. Une station prolongée, comme lorsqu'on est absorbé mécaniquement, et le décompte s'égrène. A la fin de la journée, on sait enfin si l'on a vécu.

mardi 17 mai 2011

Cupcakes

Cupcakes, livre de cuisine, publications Modus vivendi, met l'eau à la bouche. Recettes de petits bijoux dans leur écrin de papier plissé. Petits gâteaux pour le goûter, j'ai aussitôt imaginer les préparer avec mes enfants. Tasse, balance, petits moules, colorants alimentaires : tout était prêt pour cette aventure culinaire québécoise. Gentiment, les enfants se sont prêtés au jeu, et quand ils ont senti que je m'amusais bien, se sont éclipsés. Gourmandise un peu trop sucrée et décoration brouillon : j'ai tout mangé !

Battre 80 g de beurre avec 125 ml de sucre, ajouter l'oeuf, 250 ml de farine tamisée (avec 7 ml de levure chimique et 1 ml de sel) puis 75 ml de lait et 2 ml d'extrait de vanille.
Répartir dans 24 petits moules et cuire 10 à 15 minutes à 160 °C. Laisser refroidir quelques minutes avant de démouler. Glacer les gâteaux refroidis avec un mélange de 80 g de beurre ramolli  et 250 ml de sucre glace (battre le beurre seul et ajouter progressivement le sucre). Décorer de bonbons.

dimanche 15 mai 2011

Les boîtes

 Fruit vert, comme un uniforme, plutôt acide, cueilli au salon du livre, au stand "Hongrie". Istvan Orkény y décrit la vie d'une famille recevant le commandant du fils parti au front. Caricature de l'obéissance (éditions Cambourakis)...

samedi 14 mai 2011

Les gommes

J'avais lu adolescente ce roman d'Alain Robbe-Grillet (les éditions de Minuit). La quête policière, un mort qui ne l'est pas, la ville omni-présente, l'obsession des gommes : j'ai lu le premier degré, et cela m'a suffit.  La recherche de soi est entre les lignes, elle apparait peut-être quand le texte est gommé ... j'aime beaucoup. Etonnant, les deux auteurs de ma table de chevet sont décédés en 2008.

jeudi 12 mai 2011

Hors-les-murs

de Boris Schreiber (Le cherche midi éditeur).
"Un écrivain dévore sa propre substance ; il lui faut donc compenser par la substance d'autrui."
J'avais aimé Un silence d'environ une demi-heure et envie de retrouver cet auteur. Hors-les-murs, c'est le revers de la médaille : écrivain "maudit", materné par deux femmes, et renfloué par Papa. Et pourtant, attachant.

jeudi 28 avril 2011

L'Epine

Dans le grenier de la Jutière, on trouve un amas d'objets hétéroclites, qui n'ont plus d'utilité. Certains ont participé à un concours d'inventeurs ...
Le premier objet inventé permet d'amener à la conscience une partie de soi-même. Son fonctionnement est des plus simples. Il suffit de planter l'objet dans la partie du corps choisie : aussitôt, une douleur fulgurante est perçue, amenant immédiatement une prise de conscience. Si l'objet reste en place, l'effet s'atténue, mais peut se réveiller à l'occasion de mouvements inhabituels. Il est possible également d'utiliser cet objet pour des zones de l'âme que l'on aurait délaissées, comme l'estime de soi : dans ce cas, l'objet peut s'apparenter à une pointe d'orgueil.
L'Epine était le nom de mon invention. Elle n'a reçu aucun prix, car elle était peu innovante. Je travaille actuellement à son complément, qui utiliserait cette fois une perception agréable de notre être ...

mercredi 27 avril 2011

Rangement de printemps : ma table de chevet

Attachements, de Victoria Horton (Quidam Editeur)
Victoria m'avait parlé de son livre, sur le point d'être publié. J'ai su quelques bribes de sa genèse. La lecture n'en a été que plus troublante, car j'ai mordu. Le déni, plus fort que la douleur.
"Puis il y a eu l'histoire du collège. Carole avait onze ans, elle devait être en sixième. Je suis rentrée des champignons et elle avait les fesses toutes noires. Marcel était très énervé, il voulait lui faire un mot d'excuse pour le collège jusqu'à ce que les traces disparaissent parce qu'on verrait bien qu'elle pouvait pas s'asseoir et ça serait le début d'une enquête."
Dans le même thèmeLa femme en vert d'Arnaldur Indridason.

Plumes d'Ange, de Martin Winckler (POL)
L'histoire de Martin Winckler et de son père, Ange. MW est un pseudonyme, et cependant, on comprend que ce pseudonyme le relie doublement à son géniteur. MW est le nom de l'écrivain, et son père est aussi celui qui mène à l'écriture : "tu sais, il faut pour écrire, je sais, écrire envers et contre tous et parfois aussi envers et contre soi-même..."

L'été de la vie, de J. M. Coetzee (Seuil)
Que diront-ils de moi après ma mort ? Anticipation autobiographique posthume.
"Un livre devrait être un outil pour fendre la glace que nous portons en nous. Qu'est-ce que cela devrait être d'autre ?"

La Mort moderne, de Carl-Henning Wijkmark (Editions Cénomane)
Comment réduire les "coûts d'entretien" des vieux ? Scandaleux dans la Suède des années 70, ce "roman" semble être prémonitoire quant à la place des patients dans notre monde : une ligne de dépense à maîtriser ... Ce texte est à l'origine d'un spectacle qui ne manque pas de nous questionner.

Les galettes à l'orange

"Petites galettes
2 jus d'oranges pressées
mesurer et mettre la même quantité
d'huile
de sucre en poudre
2 jaunes d'oeufs
1 paquet de levure alsacienne
1 paquet de sucre vanillé
Faire dissoudre la levure dans le jus d'orange, puis ajouter le sucre, le sucre vanillé et l'huile. Bien mélanger. Incorporer la farine en quantité suffisante pour former une pâte de la consistance d'une pâte à tarte. Laisser reposer 20 à 30 minutes au réfrigérateur puis l'étaler sur 3 à 4 mm en farinant la table ou la planche.
Découper des gâteaux à l'emporte-pièce, ou simplement des carrés ou rectangles avec la roulette. Poser les galettes sur la plaque à pâtisserie saupoudrée de farine en ayant soin de ne pas les coller les unes aux autres car la pâte gonfle un peu à la cuisson.
Piquer la pâte pour qu'elle ne gonfle pas trop, dorer les galettes avec le jaune d'un troisième et éventuellement d'un quatrième oeuf dilué avec une cuillère à café de lait et faire cuire à four chaud (pas plus de 180°C) pendant 10 à 15 minutes maximum, jusqu'à ce que le dessus des galettes ait bruni et que ça sente bon."
Martin Winckler, Plumes d'Ange.

Le papier peint jaune

Il s'agit d'un récit écrit par Charlotte Perkins Gilman, publié en 1892. J'avais emprunté ce livre à la bibliothèque, il y a plusieurs années. Il est resté très présent, et je passe régulièrement devant une maison qui m'évoque cette chambre au papier peint jaune.
"Pendant quelque temps, j'ai continué à écrire en dépit de tous, mais cela m'épuise de devoir toujours feindre pour ne pas me laisse écraser par leur sollicitude." (édition des femmes Antoinette Fouque)

dimanche 17 avril 2011

Narcisses et pensées

J'avais placé les bulbes dans le grand pot bleu, sur le perron. C'était encore l'hiver. Les feuilles vertes se sont dressées, et depuis plusieurs jours, des fleurs blanches au centre jaune, très odorantes, sont apparues. Des narcisses à coeur double. Un passage dans une jardinerie, et me voilà avec des pensées, bordeaux. Je les plante avec les narcisses. Le résultat me ravit. Il ne manque plus qu'un crâne pour compléter le tableau : vanité de printemps.


mercredi 6 avril 2011

Héliotropisme



Fougère


Chercher la lumière. Trouver l'énergie. La jeune feuille se déploie et s'étire vers la source. Le mouvement est imperceptible, et pourtant, maintenant, elle n'est plus dans l'ombre. 
Elle goûte cette chaleur printanière, insensée. 

mercredi 30 mars 2011

Débourrement


Fichier:Maple-budding.JPG
Débourrement d'une feuille d'érable sycomore - Maple budding

C'est la fin de la dormance : les idées ont travaillé, enfouies dans l'obscurité de la conscience. Elles sont prêtes. Jeunes feuilles, tendres et fragiles, poussent jusqu'à la lumière. Encore fripées et sans élégance, duveteuses, elles sont la création à venir. La bourre vient au jour.